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E-invocing : report de la mise en œuvre de la facturation électronique

La facturation électronique est sur le point de devenir la norme pour toutes les entreprises. Au-delà de la simple dématérialisation, la facturation électronique, dont les modalités ne sont pas toutes encore connues, va révolutionner le quotidien des entreprises. Cette transition vers le numérique, bien que bénéfique à bien des égards, soulève également un certain nombre de questions et de défis. La préparation de cette réforme, dont le premier volet devait entrer en vigueur en juillet 2024, est un maillon essentiel de sa réussite.

Il est notoire que les entreprises, comme la plateforme gouvernementale (PPF) censée permettre cette transition, ne sont pas prêtes. C'est la raison du report de la réforme, dont le calendrier sera précisé ultérieurement...mais ce n'est pas une raison pour ne pas anticiper son entrée en vigueur !

Pourquoi généraliser la facture électronique ?


La généralisation de la facture électronique, prévue par l’article 26 de la loi de finances pour 2022, revêt une double dimension. D'une part, les entreprises, à partir d'un certain seuil, devront obligatoirement facturer en utilisant un service spécifique de facturation électonique qui permettra à l'administration de contrôler aisément leurs activités économiques - et ainsi limiter la fraude. Les déclarations annuelles de TVA devraient notamment être automatisées, ce qui représentera un gain de temps pour l'administration comme pour les entreprises. D'autre part, toutes les entreprises devront être capables de recevoir des factures électroniques, même si elles ne sont pas soumises à l'obligation de facturer de cette manière. Autrement dit, la réforme aura des impact à la fois sur les entreprises concernées par le e-invoicing et par le e-reporting.

Les avantages de la facturation paraissent significatifs. Elle permettra d'automatiser de nombreuses tâches manuelles associées à la facturation traditionnelle, réduisant ainsi le temps nécessaire pour créer, envoyer et traiter les factures. En éliminant le besoin de papier, d'impression et d'envoi postal, la facturation électronique peut également réduire considérablement les coûts, en même temps qu'elle permettra une meilleure traçabilité et un accès plus rapide aux factures, améliorant ainsi l'efficacité des processus de facturation. En minimisant l'utilisation de papier, la facturation électronique devrait aussi contribuer à la réduction de l'empreinte écologique des entreprises. Selon l'Environmental Paper Network en 2018, chaque tonne de papier économisée pourrait ainsi sauver 17 arbres et réduire les émissions de CO2 de 1,7 tonnes ; cependant, le coût environnemental de cette transition, qui va entraîner le stockage de données dans des clouds et la génération de nouvelles infrastructures de sauvegarde des données, n'est pas clairement mesuré.

Autrement dit, si certains avantages écologiques sont mis en avant, c'est surtout pour lutter contre la fraude que la facturation électronique sera particulièrement précieuse.

La généralisation de la facturation électronique en France était prévue pour 2024 pour les entreprises assujetties à la TVA en France - étant entendu que les prestataires des entreprises soumises à la réforme devront être en mesure d'accepter les factures électroniques même si la réforme ne leur est pas encore applicables :

  • le 1er juillet 2024 pour les grandes entreprises ;
  • le 1er janvier 2025 pour les entreprises de taille intermédiaire ;
  • le 1er janvier 2026 pour les petites et moyennes entreprises ainsi que pour les micro-entreprises.

 

Le contenu de la réforme

Concrètement, l'article 26 de la loi de finances pour 2022 (à lire ici) modifie le code général des impôts et le code de la commande publique pour mettre en place des changements significatifs, à la fois concernant la facturation électronique et la transmission d'informations.

Dans le code général des impôts, plusieurs modifications sont apportées. Tout d'abord, la définition de la signature électronique avancée est mise à jour pour se conformer et renvoyer au Règlement eIDAS (Règlement (UE) n°910/2014 du Parlement européen et du Conseil du 23 juillet 2014 sur l’identification électronique et les services de confiance pour les transactions électroniques au sein du marché intérieur et abrogeant la directive 1999/93/CE).

Un nouvel article 289 bis est inséré et dispose que les factures relatives à certaines opérations doivent être émises, transmises et reçues sous une forme électronique. Ces opérations comprennent celles mentionnées dans l'article 289 ainsi que les acomptes s'y rapportant. Les factures électroniques peuvent être émises via le portail public de facturation ou une autre plateforme de dématérialisation.

De plus, les assujettis doivent communiquer à l'administration les données relatives aux mentions figurant sur les factures électroniques qu'ils émettent. Ces données sont transmises par voie électronique de deux manières. L'assujetti, c'est-à-dire l'entreprise facturante, pourra d'abord utiliser gratuitement le portail public de facturation (PPF). La réforme prévoit cependant une autre option : des opérateurs proposant des plateformes de dématérialisation pourront voir le jour et proposer le même service, certainement amplifié d'autres services connexes, de manière payante. Ces Plateformes de Dématérialisation Partenaires (PDP), qui auront l'obligation de transmettre les factures au PPF et proposeront d'autres services à terme, seront identifiées comme partenaires de l'administration fiscale, et devront préalablement être agréés par le Gouvernement. Un nouveau marché s'ouvre dès lors, le processus d'agrément de ces opérateurs privés étant en cours.

Le code de la commande publique est également modifié pour étendre l'obligation d'émission de factures électroniques à toutes les personnes morales de droit public. De plus, le portail public de facturation est chargé de communiquer à l'administration les données relatives aux mentions figurant sur les factures électroniques.

Enfin, des sanctions sont prévues pour le non-respect de ces obligations, notamment des amendes pour les assujettis qui ne respectent pas l'obligation d'émission de factures électroniques et pour les opérateurs de plateformes de dématérialisation qui ne respectent pas leurs obligations de transmission de données.

Le décret du 16 mai 2023 (Décret n° 2023-377 du 16 mai 2023 relatif aux factures transmises par voie électronique et sécurisées au moyen d'une signature ou d'un cachet électronique qualifié) est venu apporter des précisions. Ce décret, qui concerne les entités assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) qui émettent ou reçoivent des factures électroniques, renforce les caractéristiques de la signature électronique, notamment en formalisant les exigences relatives à la délivrance de certificats de signatures électroniques qualifiées et à la sécurité des dispositifs permettant de créer ces signatures. Il introduit également la solution technique du cachet électronique comme méthode de sécurisation des factures électroniques. Les factures électroniques sont ainsi considérées comme valides si leur authenticité et leur intégrité sont garanties par une signature ou un cachet électronique qualifié. Ces signatures et cachets doivent être créés à l'aide d'un dispositif qualifié et reposent sur un certificat qualifié délivré par un prestataire de services de confiance. L'entreprise qui émettra une facture électronique devra conserver la facture, la signature ou le cachet électronique et le certificat électronique dans leur forme et contenu originaux. De même, l'entreprise destinataire d'une facture électronique devra vérifier l'authenticité et l'intégrité de la facture reçue et conserver ces éléments.

Anticiper l'entrée en vigueur de la réforme

Le 28 juillet 2023, la Direction Générale des Finances Publiques (DGFIP) a annoncé par communiqué de presse un report de l'entrée en vigueur de la réforme. Le ministère indique en effet qu'à la suite de négociations et échanges avec les fédérations professionnelles, les entreprises et les éditeurs des futures plateformes, "il a été décidé de reporter l’entrée en vigueur du dispositif prévue le 1er juillet 2024 afin donner le temps nécessaire à la réussite de cette réforme structurante pour l’économie. La date du report sera définie dans le cadre des travaux d’adoption de la loi de finances pour 2024 dans l’objectif de garantir aux 4 millions d’entreprises concernées un passage à la facturation électronique dans les meilleures conditions possibles".

En creux, il faut comprendre que personne n'est prêt à appliquer cette réforme, comme l'indiquaient d'ailleurs des sondages récents. Pour autant, le processus suit son cours et le nouveau calendrier, qui ne sera connu qu'en septembre 2023 avec la publication du projet de loi de finances pour 2024, ne devrait pas reporter exégérément son entrée en vigueur.

Il est donc indispensable que les entreprises, y compris les TPE et PME qui sont trop peu sensibilisées à cet enjeu, s'y préparent dès maintenant.

Pour ce faire et dans l'attente de l'agrément des PDP comme de la mise en service du PPF, plusieurs éléments doivent être anticipés par les entreprises :

  • Par la compréhension de la réforme, une première étape indispensable pour en comprendre les implications ;
  • Par l'évaluation des systèmes de facturation actuels pour déterminer s'ils sont conformes aux nouvelles exigences, et, en cas d'inconformité, par l'anticipation de la réforme en mettant à jour ou en acquerrant un nouveau logiciel qui offre une signature électronique qualifiée et un cachet électronique ;
  • Par la formation et la sensibilisation des employés qui gèrent la facturation et les finances, qui doivent être formés à ces nouvelles exigences. Comprendre ce qu'est une signature électronique qualifiée, comment vérifier l'authenticité et l'intégrité d'une facture, et comment conserver correctement les factures et les certificats électroniques sont des impératifs ;
  • Par la mise en place de procédures permettant la vérification de l'authenticité et de l'intégrité des factures reçues - ce qui peut impliquer l'utilisation d'un service de validation qualifié ;
  • Par la création ou la modification d'un plan de conservation des documents pour conserver les factures, les signatures ou cachets électroniques et les certificats électroniques dans leur forme et contenu originaux, conformément aux exigences de la réforme.

Il est évidemment recommandé de se faire accompagner par des experts du sujet !

 

 

 

L'essentiel à retenir :

  1. La facturation électronique, qui devrait devenir la norme pour toutes les entreprises, va révolutionner le quotidien des entreprises en automatisant de nombreuses tâches manuelles associées à la facturation traditionnelle, réduisant ainsi le temps et les coûts nécessaires pour créer, envoyer et traiter les factures.

  2. La généralisation de la facture électronique, prévue par l’article 26 de la loi de finances pour 2022, a une double dimension : les entreprises devront obligatoirement facturer en utilisant un service spécifique de facturation électronique pour faciliter le contrôle de leurs activités économiques par l'administration, et toutes les entreprises devront être capables de recevoir des factures électroniques.

  3. La généralisation de la facturation électronique en France était prévue pour 2024 pour les entreprises assujetties à la TVA en France, avec des dates d'entrée en vigueur différentes selon la taille de l'entreprise. Cependant, le calendrier de mise en œuvre a été reporté pour donner le temps nécessaire à la réussite de cette réforme structurante pour l’économie.

  4. Les entreprises, y compris les TPE et PME, doivent se préparer dès maintenant à cette réforme en comprenant ses implications, en évaluant leurs systèmes de facturation actuels, en formant et sensibilisant leurs employés, en mettant en place des procédures de vérification de l'authenticité et de l'intégrité des factures reçues, et en créant ou modifiant un plan de conservation des documents pour conserver les factures, les signatures ou cachets électroniques et les certificats électroniques dans leur forme et contenu originaux.

Publié le 31/07/2023